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Chez Madame
1 janvier 2009

Chez Madame... il y a une lettre (part I)

lettre

A toi,

Je dois, non pas pour me justifier (je n'en ai plus besoin) expliquer avant de commencer cette lettre te dire que tout ce qui sera écrit ici, tout ce que tu liras dans ces lignes est la simple expression de ce que je ressens, ai ressenti et ressentirai encore longtemps. Mais le fait de l'écrire, le fait de le mettre noir sur blanc va m'alléger, va me permettre d'avancer, va m'enlever ces chaussures de plomb qui me retiennent malgré moi comme clouée au sol.

Je ne sais pas et ne veux pas savoir (d'ailleurs maintenant c'est trop tard) si j'ai été une enfant désirée. Tu disais souvent que ne voulais pas de garçon, que tu ne voulais que des petites filles. J'ai cru longtemps en cette phrase... puis la réalité (enfin celle que je vivais) ne m'a pas paru identique à tes souhaits. C'est comme ça que je l'ai perçu.

Petite fille je voulais te ressembler. Je voulais etre aussi belle que toi. Tu étais pour moi la plus belle de toutes les femmes qui m'entouraient. J'ai tout tenté. J'ai parfois atteint un semblant de ressemblance... mais je ne voyais pas dans tes yeux cette étincelle que j'attendais... non, je ne la voyais pas. Alors je me suis fait toute petite dans mon coin, silencieuse, presque invisible, presque transparente. N'ayant pour tout outil à ma disposition que mes reves et ma poupée. A elle je lui racontais tout ce que je ne pouvais pas te dire à toi, par éducation, par retenue, par pudeur. On ne parle pas avec les enfants dans ma famille, dans ta famille, dans notre famille... pas plus qu'avec les fous ou les imbéciles. Alors moi l'enfant, la petite fille je n'osais pas parler, meme en demandant la permission comme tu nous l'avais enseigné, je ne demandais rien ou pas grand chose. Je voulais que tu me regardes... Je souhaitais que tu me prennes dans tes bras quand j'avais du chagrin (et que je croyais qu'il se voyait sur mon visage)... Je désirais tant que tu me carresses les cheveux autrement que pour les mettre en ordre sur ma tete, autrement que pour en faire une belle tresse dont tu ornais les pointes avec des rubans multicolores que tu faisais de tes mains.... Tes mains, longues et fines, tes mains que je trouvais tellement douces et qui pourtant ne se posaient pas sur mes joues....

Petite fille j'ai gardé pendant des heures la pose que tu souhaitais pour ne déranger personne. J'ai joué en silence sur le carrelage de ma chambre pour que tu puisses te reposer... tu étais souvent "pas bien"... tu prenais des droles de cachet qui me privaient de toi pendant des heures entières. Une autre personne s'occupait de nous pendant ces moments là. Petite fille j'ai fait des betises (pas bien grandes) pour attirer ton attention... mais là encore je n'ai pas su m'y prendre comme il le faut. Je finissais dans ma chambre, dans mon lit, avec un sentiment de ratage évident qui me faisait me sentir encore plus petite que ce que j'étais.

Puis j'ai grandi... normalement... mais j'étais toujours aussi "petite" dans ma tete. Petite non pas par la taille ou le comportement. Non, petite par l'impression de ne pas etre à la hauteur de ce que tu attendais de moi. Je ne comprenais pas tout à fait bien ce que tu voulais. Je ne me sentais pas à ma place... je me sentais ressembler à Cendrillon, toujours plus bas, toujours plus humble, toujours plus petite. Pas à la hauteur. Pas à la hauteur.

A suivre .....

*-*-*-*-*-*

(Cette lettre est assez longue. Je l'ai écrite voici maintenant 5 ans... à la suite de son départ. J'en ai retrouvé le brouillon du texte (que je déchirai une fois la lettre réécrite) et j'ai le besoin de le mettre noir sur blanc après le lui avoir lu et brulé un jour de grand mistral dans le cimetière ou elle repose)

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Commentaires
G
mais qu'est ce qui m'a poussé a ouvrir cette porte que je n'ouvrais plus depuis longtemps !<br /> je reviendrais demain !
B
je suis venue te lire quel cri, oui tu as raison dit lui repette lui, mais n'oublie pas que désormais tu es quelqu'un<br /> bisous
M
jE VIENS DE LIRE CE TEXTE SI PRENANT....les larmes aux yeux et je suis trop émue pour te répondre aujourd'hui......promis, je reviens demain .Je t'embrasse.
D
Le ventre serré en lisant ça et en pensant à cette petite fille et à son absence d'enfance... Mais quelle force elle a eue pour devenir une maman si aimante.....
C
Je te lis...en silence, mais je te lis...si tu veux bien...
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